Stéphane DURAND

Né en 1970, biologiste, ornithologue et journaliste, Stéphane DURAND participe comme co-auteur et conseiller scientifique aux aventures cinématographiques de Jacques Perrin depuis 1997.

En 2020, il rejoint les éditions Actes Sud après avoir créé la collection Mondes Sauvages. Il y anime le pôle Sciences, Nature et Société. 
Son dernier ouvrage 20 000 ans ou la grande histoire de la nature retrace le chemin d’une Histoire de la France, loin des hommes, ou plutôt en parallèle. Il fait découvrir les fascinantes évolutions et adaptations de la nature et sa formidable abondance.

> Extraits de « 20 000 ans ou la grande histoire de la nature » <

Entre chien et loup… (page 26)

Le mystère de la domestication du chien est une de ces énigmes qui résistent encore vaillamment à la curiosité des scientifiques. Archéologues, paléontologues, historiens, éthologues et maintenant généticiens, tous spéculent, débattent et brandissent leurs preuves irréfutables. Un seul consensus : le chien descend du loup gris. C’est un domaine de recherche presque aussi polémique que l’étude des origines de l’homme et, dans un certain sens, on n’est est effectivement pas si éloigné que ça. Où et quand la domestication a-t-elle eu lieu ? Une fois ou plusieurs fois indépendamment les unes des autres ? Comment et pourquoi cela s’est-il déroulé ? A quoi servaient les chiens ? Servaient-ils d’ailleurs à quelque chose ?…..

… Une fois les premiers loups apprivoisés, l’homme a exercé, consciemment ou non, une longue sélection sur ses compagnons à quatre pattes, qui à conduit en quelques siècles ou millénaires à l’apparition des caractéristiques sans équivoque du chien. La docilité et la tolérance envers l’humain tendraient à prolonger les caractères juvéniles jusqu’à l’âge adulte : c’est le phénomène de la néoténie qui déclencherait une cascade de gènes régulateurs du développement morphologique, physiologique et neural….. Le chien est un loup qui a pris l’homme chef de meute et qui a accepté d’en être totalement dépendant, au point de perdre en grandissant ses capacités d’initiative.

L’agonie des rivières (page 174)

Les rivières de France, autrefois si cristallines, deviennent brunes et engorgées de limon auxquels s’ajoutent bientôt les pollutions émises par les villes qui s’installent le long des cours d’eau. Vers l’an 1300, un moine alsacien note qu’il y a cent ans « torrents et rivières n’étaient pas aussi larges que maintenant parce que les racines des arbres dans les montagnes conservaient pour un temps l’eau de la fonte des neiges et l’humidité des nuages….

…En remplaçant l’antique roue horizontale par une roue verticale, le Moyen Âge fait la révolution technologique du moulin à eau. Dès lors en construisant des barrages, les meuniers peuvent tirer parti du plus petit cours d’eau. En quelques décennies, les rivières de France se couvrent de moulins et de barrages autrement plus difficiles à franchir par les poissons migrateurs que les modestes constructions des castors. Sur la Vienne on capte bientôt vingt moulins par kilomètre de rivière. La saturation est atteinte au XVIIIe siècle : il n’y a plus assez de dénivelé pour construire de nouveaux moulins. Les rivières rapides et chantantes sont devenues des successions d’étangs tranquilles et boueux, chauds et mal oxygénés….